Il flotte comme un vague à l’âme au dessus de nos têtes, comme une pluie d’injures et d’invectives, dans l’univers feutré des joutes diplomatiques, notre plénipotentiaire joue le rôle de l’éléphant dans un jeu de quilles. Notre précurseur est passé maître es-sciences dans l’art d’explorer de nouvelles formes d’indélicatesses et la débrouillardise d’abattre les derniers arbres de la démagogie d’État.
Non pas que ce comportement soit gênant par essence, tout homme a droit à un traitement psychiatrique si son état le requiert, on peut admettre qu’un individu ne prenne pas la mesure de ses faits et gestes, mais plutôt parce-que la fonction de Chef de l’Etat oblige à une prise d’altitude pour se situer au dessus des courants et réflexes de méfiances raciales enfouies dans le commun des mortels.
Le premier d’entre Nous est, ou devrait être l’héritier des Lumières, le garant de la protection de la Charte des Droits de l’Homme dont notre pays se dit l’égérie, bien plus que le chef de tribu du seizième arrondissement, l’investiture présidentielle nécessite autant de retenue que de tenue.
Au lieu de revêtir le feu sacré de la République, il immole Marianne en déblayant le camp de réfugiés de Calais, en renvoyant les Afghans dans un pays en guerre, en accueillant la tente de Kadhafi dans la cour de l’Elysée, en détruisantles bidonvilles des Roms. Son action se base sur la protection de la valeur de l’immobilier car il a eu le temps d’apprendre à Neuilly où les HLM sont un ricanement à peine effleuré.
Champion toutes catégories de la franchouillardise, de la France du mauvais goût et du coté controversé de la carte de France, des coups foireux plus que des coups fourés, des coups de Trafalgar, le miroir de Ceuta, plus que des coups d’États; fâché avec tout le monde, l’Europe, les Etats unis, la Turquie, le Luxembourg, l’Allemagne, il ne rampe que devant la Chine cette grande démocratie qui pourrait acheter des Airbus, l’Arabie Séoudite, ce palais des mille et une nuits qui pourrait acheter des centrales nucléaires et la Lybie ce paradis qui pourrait acheter des Rafales.
Je récuse donc à cet imposteur la faculté de me représenter, de parler en mon nom, de réfléchir pour moi, de piétiner mes plates-bandes quand il faudrait plutôt protéger mon olivier , il ne faudrait pas que pris dans le même sac on me prenne pour un de ces pigeons voyageurs ayant perdu la boussole.
L’altercation répétée avec les membres de la communauté européenne est une subtile mise en scène de l’anti-européanisme exacerbé, je pourrais l’accuser de plagiat si la diatribe nationaliste n’avait les senteurs nauséabondes. Je suis contre cette l’Europe parcequ’elle a été faite par des gens comme lui contre des gens comme moi, mais je suis fondamentalement pour une Europe des peuples, sans frontières, obligeant la Suisse à rendre tout ce qu’elle a subtilisé au reste du continent, avec le butin il y aura de quoi faire vivre les Roms et bien plus.
De Funès est prétenduement contre l’Europe que lui-même a bâti, cette Europe du commerce qui n’est qu’un espace de libre échange des marchandises tout en étant une prison dorée pour consommateurs, un ghetto de capitaux aux pulsions salaces. Il est l’artisan du grand pillage avec l’Euro comme bras armé, l’artificier du libéralisme souverain. Il ne peut être contre cette Europe qui est sa filiation, il s’en sert seulement aujourd’hui pour attiser les réflexes xénophobes, il n’est que la ligue du nord d’Umberto Bossi et du parti de la liberté (tu parles) de Berlusconnerie pour applaudir les expulsions sommaires et spectaculaires, on pourrait rêver de mettre quelques pépées dévêtues pour égayer les images du 20h.
Sauter sur les fonctionnaires de Bruxelles, ça fait monter dans les sondages, détruire les camps, ça rameute les brebis noires. On en oublie l’affaire Woerth, l’explosion du chômage (+ 10 % en un an, soit 250 000 personnes de plus) et des RMistes (+ 20% en un an, soit 300 000 personnes en un an). L’important ce ne sont plus l’évasion et le bouclier fiscaux, les 550 000 victimes de la politique infernale de libéralisation, l’important ce sont les 10 000 Roms qui mangent le pain rassi des Français.
Pas de doute, nous sommes dans le caniveau, plus si loin de ces pavés enfouis sous des tonnes de bitume populiste qu’il faudra bien creuser, pour que renaisse la mémoire des barricades.